Interviews/Asahi Shinbun/Masami Kurumada

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  • Interview de Masami Kurumada, donnée par Kunio Naitō dans le quotidien Asahi Shinbun le 21 mai 1979.
  • Traduction du japonais vers le français par Archange.
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Traduction



Introduction

Masami Kurumada


C'était un vrai rebelle à l'époque du lycée. Le poing de l'ancien banchō transperce maintenant le monde des mangas.


Masami Kurumada, né en 1953. Son père était charpentier et sa mère travaillait à mi-temps. Fils unique.

Il est passé par l'école primaire et le collège de Tsukishima, et est allé au lycée public de Nihonbashi. Pendant le lycée, il était tel un banchō. En ce qui concerne ses résultats en cours, il avait des 4 en sport et japonais moderne, et 2 ou 3 dans les autres matières. Il n'avait que 2 en dessin (notes sur 5). Mais il se disait cependant qu'il était plus doué que les autres en dessin. Il s'est mis à lire "Otoko Ippiki Gaki Daishō" de Hiroshi Motomiya durant sa troisième année de lycée et s'est dit qu'il pourrait suivre cette voie en dessinant des mangas de banchō. Après le lycée, il a travaillé 3 ans en tant qu'assistant de mangaka.


Il a envoye ses planches au Shōnen Jump afin d'y écrire des mangas de banchō, et est finalement devenu mangaka à part entière. "Ring ni Kakero", débuté il y a deux ans, est désormais un grand hit populaire. Ses œuvres principales sont "Sukeban Arashi", "Mabudachi Jingi", "Jitsoruko! Shinwakai" et "Ring ni Kakero".


Interview

Naitō : Né à Oomori, Tokyo. A grandi à Tsukishima. C'était une très mauvaise graine pendant qu'il était au lycée. Non seulement il fumait dans les toilettes, mais il respirait aussi du dissolvant à peinture et allait se bagarrer. C'était aussi un coureur de jupons qui espionnait les bains des femmes.


Exemple de banchô.
Kurumada : En y repensant maintenant, ça me fait sourire, mais à l'époque j'étais vraiment un rebelle. Je n'avais pas de but dans la vie, et rien non plus à faire. Je faisais partie d'une bande, mais j'avais envie d'essayer d'en être le chef. Je voulais absolument montrer que j'étais indispensable. Vers la fin du lycée, j'ai dessiné mes expériences personnelles en manga, et ai envoyé ça chez l'éditeur. Ce n'était pas quelque chose de bon, mais je suis malgré tout devenu assistant de mangaka. Et j'ai finalement réussi à devenir un mangaka à part entière. Je n'étais en mesure de dessiner que des choses issues de mes expériences personnelles, et je me suis donc immédiatement retrouvé à court de choses utilisables. Ça a donc ensuite été très difficile.


Il n'allait pas en cours et passait plutôt ses journées à jouer au mah-jong.


Kurumada : J'avais l'impression que tout le monde était rebelle lors de mon adolescence. Je n'avais pas de talent particulier pour les sports, et je ne visais pas non plus l'université. Je ne voyais rien devant moi. Je savais juste faire la distinction entre le bien et le mal et je faisais des bêtises en me sachant bien que c'était stupide.

Il serait exagéré de dire que j'étais un banchō. Pendant les cours je lançais des oeufs crus sur le professeur pendant qu'il regardait le tableau, j'envoyais voler des avions en papier après y avoir mis le feu, bref je faisais juste de mauvaises blagues. Mais je n'allais pas en cours la plupart du temps. Je passais plutôt mes journées à jouer au mah-jong.


Note de traduction : les banchō sont les chefs de bande de délinquants au lycée, surtout avec le stéréotype uniforme noir + casquette


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Naitō : Un dur ? Ou bien un séducteur ?


Kurumada : Je faisais comme si je me fichais des femmes, mais en moi-même j'aimais bien les femmes. Une fois que je voulais aller jeter un coup d'oeil dans le bain des femmes, je suis monté sur le toit d'un bâtiment, puis à partir de là j'ai rejoint le toit de l'établissement de bains qui se trouvait à côté, afin de regarder tout ça par la fenêtre au plafond. Mais il y avait bien trop de vapeur et je n'ai finalement rien pu voir. Et après je me suis trouvé très embêté quant à voir de quelle manière j'allais pouvoir descendre du toit.


Naitō : Le truc pour attraper les femmes ?


Kurumada : Le truc numéro un, c'est d'être un beau parleur, faire comme si on s'intéressait à elles. Après, il faut aussi avoir des vêtements classes. Le visage n'arrive qu'en troisième. Je n'ai pas de soucis de ces côtés-là, mais l'ennui est surtout que je n'ai pas le temps.


Naitō : C'est un peu ironique de penser qu'un ancien délinquant n'a désormais plus le temps de s'amuser parce qu'il est devenu un mangaka populaire.


Kurumada : Ce que je dessine en ce moment est ce qui est reçu comme divertissant, intéressant. Mais je me demande encore comment aborder le reste. C'est un métier à l'avenir incertain. Tant que l'on reste en phase avec ce qu'apprécient les enfants, on reste populaire, mais si la vapeur retombe, si l'ardeur se perd, tout est fini.


Il est finalement nécessaire de lire des livres pour trouver des inspirations

Sukeban Arashi
Naitō : Il fait ses débuts à 20 ans avec "Sukeban Arashi". C'est un récit montrant les échanges entre une jeune fille banchō et des banchō de sexe masculin. Ceci prend principalement place au "zoo" (lycée en jargon), où des "potes jurés" (véritables amis) se "bastonnent" (battent) avec des "nazes" (nuls). Il y a des histoires de "tuyaux" (informations), de "gens qui se taillent" (fuient), de "balances", et de filles mignonnes qui se font traiter de "bombasses". Et l’héroïne surmonte tout ceci au péril de sa vie à coups de nunchakus. C'est une sorte de manga rempli de jargon de yakuzas. Mais le maître s'est vite retrouvé dans une impasse, à court de matériau.


Kurumada : Il est finalement nécessaire de lire des livres pour trouver des inspirations. J'ai lu les romans sur la période du Bakumatsu écrits par Ryūtarō Shiba. J'en ai tiré des inspirations.


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Naitō : Et sa deuxième oeuvre, Ring ni Kakero, a complètement changé de style d'histoire. Kiku, une grande soeur à l'esprit battant, élève pousse son calme petit frère Ryūji afin que celui-ci devienne un champion de boxe. Ceci est une histoire empruntée de manière très similaire à "Ryōma ga Yuku", qui met en scène une grande soeur battante, Otome, qui élève son calme petit frère Ryōma pour que celui-ci fasse de grandes choses.


Durant les scènes de combat, on peut voir surgir Hideyoshi Toyotomi ou Shinsaku Takasugi. Il reprend le poème « Omoshiroki koto mo naki yo wo omoshiroku suminasu mono ha kokoro narikeri » (ndt: poème de Takasugi qui signifie globalement qu'il ne tient qu'à soi de rendre intéressante une vie inintéressante) et la change en un réarrangement moderne qui dit « Se contenter de vivre chaque jour sans aspiration ne conduit qu'à une vie merdique en ennuyeuse. Ce sont les actes qui peuvent permettre d'y trouver de la joie ».


Les principes nobles humains y sont décrits avec attention, et l'on y voit par exemple expliquée la vie de Shōin Yoshida, qui était allé jusqu'à devenir un samurai sans seigneur afin de tenir la promesse faite à ses amis. Les mangas de banchō ont fini par prendre un aspect noble.


Ring ni Kakero.
Kurumada : Mais si l'on dessine en voulant enseigner quelque chose aux lecteurs, on ne devient pas populaire. La popularité de Ring ni Kakero est soudainement grimpée parce que Ryūji a cessé de se laisser écraser et a cherché à gagner quoi qu'il lui en coûte. Sans victoires, on ne peut attirer la popularité.


Le mariage ? Je n'ai pas suffisamment confiance en moi-même pour ça


Naitō : Il peut actuellement souffler un peu grâce aux jours féries de la Golden Week, mais il se fait habituellement poursuivre chaque semaine par les chapitres à publier.


Kurumada : Aujourd'hui, j'ai travaillé toute la nuit jusqu'à 11 heures du matin. C'est parce que l'histoire ne me venait pas à l'esrpit. Je pensais enfin pouvoir dormir, mais tu es venu me réveiller.


Naitō : Cette interview a lieu en pleine Golden Week, à 15 heures. Le maître a encore les yeux endormis. Est-ce que vous profitez avec plaisir de ces congés.


Kurumada : Oui, beaucoup. Comme les imprimeries vont fermer, le département d'édition n’arrête pas de me presser. Je travaille tous les jours jusqu'à l'aube, et je dors ensuite jusqu'à midi passées et je me remet à travailler, sans m'arrêter.


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Naitō : Les jeunes gens de votre âge s'amusent en faisant du surf ou voyagent à l'étranger. Les choses sont pénibles pour vous.


Mabudachi Jingi, de Masami Kurumada
Kurumada : Je me le demande. Les jeunes ne restent-ils pas plutôt chez eux à paresser sans rien faire de spécial ? Les médias nous montrent des jeunes qui s'amusent dans toutes sortes d'activités géniales, mais je pense que ça ne concerne en fait qu'une petite part de la population.


Naitō : Quelle occupation vous procure le plus de plaisir ?


Kurumada : Lorsque j'ai commencé à dessiner des mangas, le fait de dessiner des mangas était ce qui était le plus amusant pour moi. Mais maintenant ce que je préfère c'est quand je termine le travail et que je reste ensuite regarder dans le vide sans penser à rien.


Naitō : Est-ce que vous respirez du dissolvant ?


Kurumada : Mais non, ça fait bien longtemps que j'ai arrêté ça.


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Naitō : Vous allez draguer des filles ?


Kurumada : Le travail est difficile, et je n'ai donc pas le temps pour ça. En vérité, plus je suis fatigué et plus j'en ai envie. Et ceux qui travaillent avec moi font en plus des blagues très salaces. Lorsque je n'ai pas d'argent, je vais au soapland, et lorsque j'en ai, ça ne m'intéresse plus.


Notes de traduction :

  1. Les soaplands sont des établissements de prostitution sous la forme d'établissements de bains. Il n'est pas spécialement embarassant pour un homme au Japon de dire qu'il y va, à plus forte raison à l'époque où à été donnée l'interview.
  2. Il peut paraître paradoxal que Kurumada aille au soapland quand il n'a pas de sous (vu que c'est payant) et qu'il n'y aille pas quand il a des sous, mais il faut comprendre par là que Kurumada est le cliché même de l'edokko (natif de Tokyo), qui est du genre à économiser puis tout dépenser pour se faire plaisir quand il a du mal à gagner de l'argent, mais qui ne dépense presque rien une fois qu'il a des revenus confortables. Cette attitude se retrouve plus loin dans une autre de ses réponses.


Naitō : Vous n'avez qu'à vous marier alors.


Kurumada : Je n'ai pas suffisamment confiance en moi-même pour ça. Quel sera le résultat si un gamin comme moi se marie ? Je ne veux pas me marier tant que je ne serai pas sûr de mon avenir.


Naitō : Que pensez-vous que vous seriez devenu si vous n'étiez pas devenu mangaka ?


Kurumada : Je suppose que j'aurais fait du travail à la chaîne dans une usine. Mes parents n'étaient ni des gens influents, et sans argent, pas de haute éducation. Je ne suis pas non plus quelqu'un d'intelligent, et je n'ai pas de talent exceptionnel. Je pense que pour les jeunes de ce genre, le destin est presque entièrement décidé.


Ce serait d'avoir des jambes un peu plus longues...


Sukeban Arashi
Naitō : Cela fait déjà 8 ans depuis qu'il a terminé le lycée. Il n'a pas revu ses anciens compagnons depuis, et ils n'ont pas non plus tenté de prendre des nouvelles les uns des autres. La seule personne de cette époque que Masami Kurumada ait contacté, juste une fois, fut Kazuhiko Kinjō, qui était son professeur principal. Celui-ci avait aidé Masami Kurumada lorsqu'il avait été expulsé du lycée ou lorsqu'il avait eu des problèmes avec la police. Lorsque son premier manga a été publié, le maître Kurumada lui a juste envoyé une lettre disant « Regardez, professeur ».

« Ce jeune fauteur de troubles a fait ça ? » nous a dit son professeur Kinjō, heureux de voir de quelle manière avait mûri Masami Kurumada, même s'il ne sait pas trop quel genre de manga son élève dessine ni quelle est sa popularité, ayant peu d'occasions d'être en contact avec les mangas. Lorsqu'on lui pose des questions sur le passé de Masami Kuruamda, celui-ci nous répond :

« Il était fort pour les bagarres, et ça arrivait assez souvent pour qu'on puisse le traiter de fauteur de troubles. Mais on ne peut pas dire non plus que c'était un délinquant. Lors du festival culturel de l'école et en d'autres occasions similaires, il a fait des dessins qui ont reçu un très bon accueil, et je pense que ces dessins l'ont aidé à mûrir. Il a grandi lorsqu'il a terminé le lycée. »


Naitō : N'avez-vous pas envie de revoir votre professeur ?


Kurumada : Je ne veux pas le rencontrer tant que je suis encore à mi-chemin. Je veux le revoir une fois que j'aurai encore plus grandi.


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Naitō : Il repense au lycée.


Kurumada : J'étais de la mauvaise graine, fourbe. Je ne veux pas revenir à cette époque.


Naitō : Et si dans le futur vos enfants décident de devenir banchō ?


Kurumada : Je leur dirai avec joie « Faites de votre mieux ».


Naitō : Si vous pouviez exaucer un souhait ?


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Kurumada : Comme j'ai des sous, je peux acheter ce dont j'ai envie. Mais à part ça, je serais bien content d'avoir des jambes un peu plus longues.


Naitō : Vous faites un complexe sur la longueur de vos jambes ?


Kurumada : Comme je fais 166 cm, ce n'est pas dramatique, mais je pense qu'avec des jambes plus longues j'aurais l'air plus classe.


Naitō : Comment vous voyez-vous à 50 ans ?


Kurumada : Probablement mort comme un chien crevé au bord de la route, non ?


Naitō : Si vous aviez pendant une journée 1 million de yens à utiliser ? (ndt: environ 3500 euros en considérant le cours du yen de l'époque et l'équivalent en francs)


Kurumada : J'ai déjà cette somme à ma disposition. Mais ça me donne plutôt envie de ne pas l'utiliser.


Fin de traduction