Interviews/Taizen/Masami Kurumada

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  • Interview de Masami Kurumada publiée dans le Taizen.
  • Traduction du japonais vers le français par Archange.
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Traduction

Notes du traducteur

- famicom: Nom de la NES (Nintendo Entertainement System) au Japon.

- nekketsu: au sang chaud, quelque chose plein d'ardeur et de passion.

- nemu: nom donné au storyboard du chapitre + travail d'agencement des cases.


1) Pour commencer, parlez-nous de ce qui a précédé Saint Seiya.

Kurumada : Auparavant j'avais fait "Ring ni Kakero", puis "Fûma no Kojirô" et enfin "Otokozaka". Mais comme ce dernier n'était guère populaire, sa vie fut très brève. La popularité est tout dans un magazine à forte vocation commerciale. Et je me suis alors dit qu'au lieu de faire un nouveau manga rustre et sentant la sueur, j'allais plutôt me concentrer sur le côté divertissement, et c'est ainsi que Saint Seiya est né.


Masami Kurumada (années 2010)

2) Avez-vous trouvé divertissant de dessiner ce manga au thème considérablement différent de vos précédentes oeuvres ?

Kurumada : En effet. Les trois mangas que j'avais alors publiés dans ce magazine n'utilisaient pas de thème révolutionnaires par rapport à son contenu. Ring ni Kakero était une histoire de boxe, Fûma no Kojirô une histoire de ninjas, et Otokozaka une histoire sur un chef de bande. Saint Seiya était en revanche un univers que personne n'avait jusqu'alors imaginé. La mythologie grecque et les constellations sont devenues les fondations de l'oeuvre et de plus, les Cloths elles-mêmes étaient capables de prendre la forme de leurs constellations. Leurs formes changeaient énormément entre les versions portées et non-portées, ce qui faisait leur donnait un intérêt semblable à celui des maquettes de modèles réduits. Enfin... on pourrait peut-être plutôt parler de "poupées à habiller pour garçons". Et puis comme la mythologie grecque a un côté romantique, cela pouvait aussi attirer les filles. Mais malgré tout, la base reste quand même du nekketsu pur et dur, pas vrai ? J'y ai inséré tous les éléments qui font l'essence même des mangas nekketsu Kurumada, les ingrédients des aventures kurumadiennes.


3) On dit que les noms sont un des points particuliers de Saint Seiya, et des termes comme "Cosmos", "Saint" ou "Cloth" ont plu aux lecteurs, n'est-ce pas ?

Kurumada : En y repensant, je me suis vraiment bien débrouillé avec Saint Seiya (rires). Le mot Cosmos peut être appliqué à tout un tas de choses. Par exemple, quand il s'agit de ressentir l'intention meurtrière d'un ennemi ou bien pour parler de l'élévation de puissance, dans tous les cas on en revient simplement à brûler son Cosmos. En ce qui concerne les Cloths, c'est parce que j'avais vu que les dieux de la mythologie grecque étaient vêtus de simples tissus. A partir de ça, j'ai imaginé le terme de "tissus sacrés" (聖なる衣 - seinaru koromo), que j'ai ensuite compressé en "Cloths" (聖衣).


4) Je suppose que vous n'aviez pas prévu au début de faire figurer tant de Cloths et de Saints, n'est-ce pas ?

Kurumada : Si, c'est quelque chose qui était prévu dés le début. Après tout, les constellations du zodiaque sont les plus simples à utiliser, et des noms comme Leo ou Sagittarius ont de la classe. En principe, c'est le genre de constellations que l'on pourrait être tenté d'utiliser dès le début, mais je voulais absolument les garder pour les ennemis puissants qui arriveraient plus tard dans l'histoire. Je n'avais pas l'intention de m'en servir immédiatement, et c'est pourquoi j'ai choisi des constellations comme Pégase ou le Cygne parmi ce qu'il restait.
Les Gold Saints, qui ont supporté le coeur du récit. Il était prévu dès le début qu'ils se dressent sur le chemin des Bronze Saints tels des obstacles infranchissables. (ndt: image présente sur la page d'origine)

5) Quelle a été la réaction des lecteurs lorsqu'il ont découvert cette oeuvre si différente de celles auxquelles vous les aviez habitués ?

Kurumada : Il y avait en effet de nombreux nouveaux éléments présentés et difficiles à saisir pour les lecteurs, tels que les "Saints", le "Cosmos", le "Sanctuaire" ou bien encore la mythologie grecque. Il a bien fallu dans les 6 mois avant que les lecteurs n'accrochent vraiment, et chaque chapitre jusque là fut une dure bataille.
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6) Et sinon, l'anime de Saint Seiya a été lancé très tôt après le début de la prépublication du manga. En ce qui vous concerne, qu'avez-vous pensé de cette idée ?

Kurumada : Je me suis dit que ce serait un bon soutien pour le manga. En gros, que les gens ne lisant pas le manga découvriraient Saint Seiya à la télé et se diraient alors « je ne savais pas que cette oeuvre existait ! Je lirais bien le manga ! ». Une excellente publicité destinée aux gens ne connaissant pas les mangas à la mode, à ceux qui ne lisent pas de magazines de manga, et à ceux qui ne connaissent pas les mangas Kurumada.


7) L'anime et le manga se marient très bien et je pense que chacun est capable de stimuler la passion du lecteur ou du téléspectateur, mais en ce qui vous concerne, qu'avez-vous pensé de l'anime en le voyant ?

Kurumada : Le point fort de l'anime est bien entendu de bénéficier de son. Le son est quelque chose qu'il est impossible d'exprimer correctement via des onomatopées. Par exemple, quand des personnages s'écrasent violemment quelque part, une simple onomatopée ne retranscrit pas vraiment la sensation. La force apportée par le son est une chose à laquelle la version papier ne peut faire face.


8) Un très grand nombre de personnages apparaissent dans Saint Seiya mais les 5 personnages principaux restent les mêmes du début à la fin. Leurs personnalités sont également très distinctement complémentaires.

Kurumada : Ça se peut, en effet, car lorsque j'ai imaginé les personnages, j'ai fait en sorte de ne pas leur donner des personnalités trop différentes, mais en faisant cependant en sorte qu'elles ne soient pas non plus redondantes. Un gars gentil, un autre cool et détaché, un autre nekketsu, un autre sérieux, et un dernier incroyablement offensif, et ainsi je pense que les cinq forment un groupe équilibré. Sinon, il n'est pas rare dans les mangas Kurumada que les personnages secondaires deviennent plus populaires que les personnages principaux. De nombreux lecteurs tiennent à tel ennemi ou tel personnage.


9) Ce genre de personnage est populaire et est une des raisons pour lesquelles le boom Saint Seiya a eu lieu. Vous rendiez-vous compte à l'époque de l'immense hit que c'était ?

Kurumada : En fait les mangakas ont tendance à rester quasi-enfermés dans leurs studios dans le cas d'un magazine hebdomadaire, et dessinent alors jour et nuit en se reposant peu. Pour être honnête, ne n'avais pas concrètement conscience de l'ampleur du hit. Je m'en rendais tout au plus compte en fonction du nombre de lettres de fans. J'ai par exemple été très surpris lorsque les ventes des volumes du manga ont franchi la barre des 10 millions.


10) Mais en dépit du boom, avez-vous parfois ressenti que c'était difficile à dessiner ?

Kurumada : C'était déjà le cas tous les jours. Et si vous voulez savoir pourquoi, c'est parce que lorsque je conçois des nemu, je ne stocke pas mes idées mais les cherche plutôt au fur et à mesure que j'en ai besoin. On me dit souvent que ce n'est pas très optimal et que je ferais mieux de consigner de temps en temps mes idées pour les réutiliser plus tard. Mais comme je ne le fais pas, je me retrouve chaque semaine à réfléchir de nouveau à partir de zéro. Et c'est pourquoi les nemu sont fatigants (rires).
Masami Kurumada (années 2010)

11) Le décor de l'histoire joue aussi son rôle mais le style Kurumada ainsi que sens du nekketsu sont des choses qui marchent aussi bien au Japon que dans le reste du monde, n'est-ce pas ?

Kurumada : En effet, le manga et l'anime sont devenus populaires à l'étranger, et j'ai reçu des lettres de fans étrangers. Les mangas japonais sont vraiment lus par beaucoup de gens en divers endroits du monde. Lorsque j'étais enfant, les adultes avaient une attitude de dédain envers les mangas, du genre « mouarf, un manga ? ». Ceux-ci étaient considérés comme des choses dérisoires. Mais de nos jours, les mangas se répandent bien plus que des romans ou films médiocres. J'avais d'ailleurs un magasin pour mes oeuvres nommé "Seiya Club". Et je ressens toujours de la gratitude lorsque je vois sur internet que Saint Seiya est toujours populaire en France ou en Espagne.
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12) On peut dire que vous avez vraiment sorti au bon moment cette histoire au contexte international.

Kurumada : Les mangas sont devenus bien plus populaires qu'autrefois. Ils sont par exemples traduits en espagnol, en italien, ou bien entendu en anglais. J'ai aussi participé à une interview dans une émission de télévision française via un appel téléphonique international. C'est à partir de ce moment-là que j'ai pris conscience de la popularité des mangas japonais à l'étranger.


13) Un manga intéressant gardera son intérêt quel que soit la nationalité des lecteurs, n'est-ce pas ?

Kurumada : Oui voilà. On parle souvent des différences entre les pays ou les ethnies, mais les choses intéressantes le restent quels que soient les pays ou les ethnies. On dit parfois que la sensibilité japonaise n'est pas comprise en Amérique mais je ne suis pas d'accord avec ça. Je pense que les choses capables d'émouvoir ou de pousser aux larmes fonctionnent partout à travers le monde. Tiens d'ailleurs, et si je faisais un film live de Saint Seiya à Hollywood ? Avec de jeunes hommes blonds très classes. Je pense que ça aurait de l'allure avec par exemple des épées enflammées qui créent des explosions ou qui transpercent des choses.


14) C'est quelque chose que j'ai envie de voir. Sinon, d'autres mediums ont été touchés en plus de l'anime, tels que des figurines ou des jeux vidéos. Que pensez-vous de tout cela ?

Kurumada : C'est depuis l'époque de Saint Seiya que je me suis rendu compte que les mangas se répandant sur plusieurs autres médiums se démarquent particulièrement du reste. A l'époque, un jeu famicom était sorti, et il y a aujourd'hui de nombreux mediums divers permettant de réaliser aisément ce genre de "media-mix". Personnellement, je trouve tout ça intéressant.


15) Même de nos jours lorsqu'on consulte Internet, on peut constater qu'il existe plusieurs sites personnels de fan passionnés. Est-ce que ceci vous donne l'impression que cette oeuvre demeurera immortelle ?

Kurumada : Il en va de même pour Ring ni Kakero, mais ça me donne l'impression que les mangas Kurumada ne sont jamais complètement finis. Voir qu'il y a toujours autant de fans passionnés de Saint Seiya est une satisfaction suprême pour moi en tant qu'auteur.
La popularité des personnages a grimpé en flèche grâce au boom Saint Seiya. Le soutien et la frénésie des fans collégiennes et lycéennes ont fait que chaque personnage avait ses propres groupies. (ndt: image présente sur la page d'origine)

16) Et si vous deviez vraiment écrire la suite de Saint Seiya, à quoi est-ce que ça ressemblerait ?

Kurumada : Je pense qu'il devrait bien entendu s'agir du dernier grand thème restant, à savoir le Tenkai-hen. Et plein de personnages classes feraient leur apparition, comme les 12 dieux de l'Olympe, avec par exemple Artémis ou Apollon. Ce serait probablement une bataille épique. J'y laisserai peut-être ma peau si j'ai l'occasion de dessiner ce chapitre (rires). Je n'ai plus trop envie de le faire quand je pense que je vais probablement me consumer entièrement en travaillant dessus.
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17) Mais il se peut que cela devienne réalité en enflammant votre Cosmos, n'est-ce pas ?

Kurumada : Bien sûr. Après tout, dans le cas de Ring ni Kakero 2, j'ai continué à accumuler des idées pendant 20 ans tandis que je travaillais sur d'autres oeuvres. Il m'arrive de la même manière de me dire que je pourrais utiliser telle ou telle chose dans Saint Seiya. Peut-être pourrais-je montrer tout ça aux lecteurs une fois que tout aura solidement pris forme dans mon esprit. Je ne veux pas me lancer dans une continuation de l'histoire juste parce qu'en ce moment faire des suites des anciens hits est à la mode. Je ne veux pas débuter du Saint Seiya en prenant les choses à la légère. Ne faire les choses qu'à moitié est un manque de respect envers les lecteurs, et également quelque chose qui me rebute a titre personnel.


18) Et en rétrospective, quel genre d'oeuvre est Saint Seiya à vos yeux ?

Kurumada : Si Ring ni Kakero est effectivement le manga qui a fait sortir de l'anonymat "Masami Kurumada" pour les lecteurs japonais, Saint Seiya est l'oeuvre qui m'a permis d'aller un pas, même deux pas plus loin en tant que mangaka, et qui a donné des rêves et de l'émotion aux lecteurs du monde entier. S'il fallait leur décerner des titres comme en sport, Ring ni Kakero se trouverait dans la catégorie Japon tandis que Saint Seiya serait dans la catégorie Mondiale.


★ ★ ★ ★ ★ Le Cosmos de Masami Kurumada est aussi ardent que ses oeuvres ! Il est impossible de ne pas ressentir en lui l'énergie créée par les Saints en voyant ses yeux aussi pétillants que ceux d'un jeune homme et au travers de cette discussion passionnée.Saint Seiya transcende les époques en continuant de vivre dans le coeur des gens.


Fin de traduction